dimanche 30 novembre 2014

Enfants sans enfant

Il y a ces jours sans(1), ces (si) rares jours qu'on appelle les jours adolescents, les jours enfants-sans-enfant, de ceux qu'on aurait passés à peine autrement à quinze ans(2)
Il y a aussi les poignées d'heures buissonnières, volées au fracas quotidien, celles qu'on oublie un peu au lit, celles qui nous transportent et qu'on ne compte pas(3), celles qu'on achève en mangeant des sushis. 

(4)


(1)
mais avec :
collations, musique, crayons, lecture,












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(4)
Aujourd'hui, on trouve tout ce qu'on veut à Londres, en théorie -y compris des fruits et des légumes hors saison, grâce aux congélateurs- et toutes sortes de charcuterie du continent. Mais peut-on vraiment cuisiner ? Une recette de cuisine du livre d'Alice Toklas inclut, par exemple : un morceau de porcelet, un foie de poulet, un brin de basilic, de la marjolaine sauvage et une pincée de romarin. Imaginez trouver de telles choses à Londres, y compris à Soho ! Mais au marché de Palma(5), ce serait la chose la plus naturelle du monde.
Robert Graves. Por qué vivo en Mallorca. (Je traduis ici librement la traduction espagnole qu'ont réalisée Lucía Graves et Natalia Farrán Graves de l'anglais)

(5)
C'est au marché de Palma de Majorque que Jeanne, notre cuisinière française, a tenté de m'enseigner le meurtre par étouffement. Elle n'avait aucune raison de commettre ce crime en public ni de s'attendre à ce que j'y participe. Elle voulait simplement se rendre intéressante. Quand la foule de marchandes qui s'était rassemblée autour d'elle s'est mise à crier et à gesticuler, j'ai battu en retraite. Lorsque nous nous sommes retrouvées plus tard dans la carriole pour rentrer à Terreno, où nous avions une villa, j'ai refusé de sympathiser avec Jeanne. Elle disait que les Majorquins étaient assoiffés de sang, n'allaient-ils pas à des corridas et ne payaient-ils pas cher la viande des taureaux qu'ils avaient vu abattre dans l'arène, ne préféraient-ils pas trancher la tête à d'innocents pigeons plutôt que de les étouffer humainement, ce qui était la façon d'éviter que la volaille ne saigne à mort et la rendait plus pleine et plus savoureuse. N'avait-elle pas essayé de leur expliquer cela, de leur enseigner, de leur montrer comment une personne intelligente et humaine s'y prenait pour tuer des pigeons, mais non, ils ne voulaient pas apprendre; ils préféraient leurs propres méthodes brutales. Au déjeuner, quand elle servit les pigeons, Jeanne se tut discrètement. Nous avions découragé à table les discussions sur la nourriture, qu'elle aimait par-dessus tout. Mais ses fins yeux noirs étaient éloquents. Même si les petits pigeons que l'île n'étaient pas très gros, c'étaient bien des pigeonneaux, et ils étaient bien plus grands et succulents que ceux que nous avions mangés dans l'excellent restaurant de Palma. 
Alice Toklas. Livre de cuisine

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